Dépôt de bilan de Presstalis : la direction joue au pompier-pyromane
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Alors que les représentants des salariés réclament du temps, la direction du principal distributeur français de presse Presstalis leur met le couteau sous la gorge en choisissant, non sans cynisme, un moment tragique de pandémie pour se déclarer en cessation de paiement. Une bien mauvaise façon de prôner le dialogue social… Le PDG de Presstalis – anciennement Nouvelles messageries de la presse parisienne, NMPP – a annoncé, ce mardi 21 avril, avoir déclaré l’entreprise en cessation de paiement auprès du tribunal de commerce et en avoir informé les salariés. Assumant ce geste irresponsable dans la situation actuelle de confinement, Cédric Dugardin assume avoir pris cette décision pour « accélérer les discussions en plaçant toutes les parties prenantes face à un sentiment d’urgence ». Comme si harceler les négociateurs était le meilleur moyen de faire avancer un dossier aussi complexe, alors que les marchands de journaux font face à un effondrement des ventes lié à une épidémie mondiale. Un geste « sans conséquence immédiate », prétend la direction, mais alors pourquoi ? Le 16 avril, les ministres de la Culture et de l’Économie avaient annoncé qu’ils travaillaient à un plan global pour la presse, prenant en compte la question de Presstalis…
En réalité, après un plan de redressement en 2018 qui s’était traduit par une réduction des effectifs (de 1130 à 900 salariés) et un prêt par l’État de 90 millions d’euros, la coopérative fait face à une guerre de tranchée entre deux conceptions de la distribution. Une première, solidaire et unitaire, portée notamment par les éditeurs de la presse quotidienne, pour la continuité d’un service universel. Une seconde, qui consisterait à scinder la distribution des quotidiens et celle des magazines, en partenariat avec les Messageries lyonnaises de presse (MLP), concurrent de Presstalis. Cette deuxième option, privilégiée par les éditeurs de magazines, ouvre de nombreuses incertitudes, notamment sociales. C’est pourquoi les représentants CGT des salariés ont demandé, le 4 avril, « du sérieux et du temps ». En réalité, après un plan de redressement en 2018 qui s’était traduit par une réduction des effectifs (de 1130 à 900 salariés) et un prêt par l’État de 90 millions d’euros, la coopérative fait face à une guerre de tranchée entre deux conceptions de la distribution. Une première, solidaire et unitaire, portée notamment par les éditeurs de la presse quotidienne, pour la continuité d’un service universel. Une seconde, qui consisterait à scinder la distribution des quotidiens et celle des magazines, en partenariat avec les Messageries lyonnaises de presse (MLP), concurrent de Presstalis. Cette deuxième option, privilégiée par les éditeurs de magazines, ouvre de nombreuses incertitudes, notamment sociales. C’est pourquoi les représentants CGT des salariés ont demandé, le 4 avril, « du sérieux et du temps ». Élément important dans le système de distribution de la presse en France, la loi du 2 avril 1947, dite loi Bichet, permettait à chaque éditeur, quelles que soient sa taille et son influence, d’avoir l’assurance d’être distribué. Chaque éditeur avait le choix entre assurer lui-même sa distribution ou le faire au sein d’une coopérative d’éditeurs, avec une égalité de traitement entre les différents titres. Cette loi a été attaquée et réformée en 2019, au motif de donner davantage de liberté aux kiosquiers, avec un calendrier prévoyant, à terme, l’ouverture majoritaire du capital des distributeurs à des fonds privés.
Il ne reste donc plus grand chose de ce système solidaire mis en place à la Libération pour accompagner le développement d’une presse libérée. L’État a tué le service public de la distribution, et les gens de profit qui ont pris le relais dans les groupes de presse sont désormais aux manettes d’un système dont les fondements philosophiques leur échappent complètement : le Crédit Mutuel (groupe EBRA), LVMH (Les Échos, Le Parisien), Dassault (Le Figaro), Lagardère, Niel, Bouygues, Bolloré, etc. Des gens d’argent, pas d’information, de pouvoir pas de démocratie ni de pluralisme. Il ne reste donc plus grand chose de ce système solidaire mis en place à la Libération pour accompagner le développement d’une presse libérée. L’État a tué le service public de la distribution, et les gens de profit qui ont pris le relais dans les groupes de presse sont désormais aux manettes d’un système dont les fondements philosophiques leur échappent complètement : le Crédit Mutuel (groupe EBRA), LVMH (Les Échos, Le Parisien), Dassault (Le Figaro), Lagardère, Niel, Bouygues, Bolloré, etc. Des gens d’argent, pas d’information, de pouvoir pas de démocratie ni de pluralisme. Certes, il y a bien un plan proposé par Hélène Bourbouloux, la conciliatrice, qui prévoit une mobilisation de fonds publics (60 millions d’euros d’investissement, 60 millions d’euros de prêts) afin de suppléer les fonds privés et monnayer la participation des éditeurs au futur système de distribution. Le plan parle d’argent… Pour l’heure les grands patrons ont besoin d’aides, bien sûr. Plus tard, un jour peut-être, il y aura un plan industriel, technique, prenant en compte l’intérêt des lecteurs, des salariés et de la démocratie. Une démocratie qui aurait tout à gagner au maintien d’une presse imprimée pluraliste.